Papaoutai
Ce documentaire sur la CIA et ses méthodes de "recherche", années cinquante. Quelques images fugitives en noir et blanc de patients "traités" par coma insulinique...
Comme mon père, qui bénéficia de l'alternative "humaine" que c'était censé représenter par rapport aux électrochocs classiques, au milieu des années cinquante.
Mon père. Vingt ans après sa mort, il me manque. J'en pleure. Comme si cette absence m'était nouvelle. Il m'a toujours manqué. Même ces quelques années où je l'ai fréquenté un peu, il y a presque quarante ans.
Il était à des milliards d'années lumière du portrait de monstre qu'on m'en avait fait. Il n'était pas cette horreur à laquelle il ne fallait pas que je ressemble. C'était juste un pauvre mec, cassé, et malheureux. On s'est loupés. Pas pu lui parler. Pas pu l'entendre non plus. On s'est manqués... encore !
Pas pu lui dire ces rêves de gamine où je pouvais enfin lui parler. Pour me faire une image de mon interlocuteur, selon mon âge, il a eu d'abord les traits de Buster Keaton, le maladroit muet ; puis ceux d'Antonin Artaud, le schizophrène à la beauté troublante, celui qui avait la même "maladie" que lui, et qu'on craignait que j'aie aussi.
J'ai soixante ans, et je pleure encore son absence. Son obsédante absence.