Mise en cinquantaine
Je n'ai plus vingt ans. Mes amours non plus. Et, dieux merci, c'est une bonne chose.
L'âge prenant. Les cabossades qu'on hérite de ses tribulations. Tout ça... Commencer à s'étonner d'être en vie.
Et l'amour qui reste à faire. Même s'il se fait rare. Surtout s'il se fait rare, et d'autant plus précieux.... Monsieur Ferré vitupère contre la tendresse, la gueule amère et le verbe haut. Pourtant...
Loin de percevoir de l'affadissement dans ce que je vis, il me semble plutôt que tout s'affine. Ce n'est plus la part animale, frénétique, hormonale, génésique, de ma femellitude qui me jette sur l'autre. Dans ces étreintes guerrières où la femelle accroche et le mâle tente la fuite glorieuse... pour le bon vouloir de l'espèce et sa reproduction. Ce grand tumulte-là ne se fait plus entendre.
Ce désir que je soupçonne, maintenant, rare, fugitif, évanescent et tendre me semble venir d'ailleurs. Comme si... Comme si, désormais, je n'étais plus de ces reproducteurs que pousse le torrent de la vie. Comme si, maintenant, "qui je suis" cherchait vraiment "qui tu es". Comme si l'immobilité devenait le prélude d'une vertigineuse extase, une fois oubliés la précipitation, le geste et la passion.
C'est peut-être que je sais combien chaque mort ressentie, fût-elle petite, me rapproche de la grande ? C'est peut-être que je sais que le temps, vraiment, m'est compté ?
Le désir se serait alors fait méditant ? Et pourquoi pas ?